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La maison des enfants de la danse

Lettre de Shila : “La longue marche d’un troupeau d’éléphants en Chine”

Chers enfants,

Je vous ai déjà parlé du conflit hommes-animaux sauvages, dont l’origine vient de la destruction des forêts, du changement climatique et du manque de nourriture ce qui pousse les animaux et surtout les éléphants à quitter la forêt et à piller les cultures des fermes environnantes.

Ce conflit est très fort dans le nord de l’Inde, au Bengale Occidental à 2300 kilomètres de chez moi, où des foules incontrôlées jettent des boules de feu sur les éléphants pour les chasser. Une photo d’un éléphanteau dont les jambes arrières sont en feu a suscité l’indignation du monde et mis en avant le conflit. Je pleure quand je on me raconte cette histoire dramatique.

Un peu plus loin, en Chine, à environ 4000 kilomètres de Kurichithanam, il se passe une histoire extraordinaire, un troupeau de dix-sept éléphants a quitté sa réserve de Mengyangzi dans le Xishuangbanna, en mars 2020 !!

Le troupeau, dirigé sans aucun doute par une grand-mère éléphante, a vu repartir deux de ses éléphants qui ont préféré retourné dans la réserve. Entre temps un bébé est né, au cours de ce périple, qui les a conduits à près de 600 kilomètres de la réserve de Mengyangzi !!

Ils sont actuellement dans la banlieue de Kunming dans le Yunnam.

C’est à Kunming que doit avoir la rencontre mondiale sur la biodiversité.

La 15ème conférence des parties à la convention sur la diversité biologique devrait finalement avoir lieu du 11 au 24 octobre 2021. Elle devait initialement se tenir en octobre 2020, puis en mai 2021. Le lieu reste inchangé, c’est à Kunming en Chine.

Un commentaire humoristique chinois fait une remarque très juste : les éléphants veulent probablement participer à la conférence des nations sur la biodiversité à Kunming.

Je suis complètement d’accord avec ce commentaire, je connais l’intelligence de ma famille et je suis sûre que cette manifestation n’est pas un hasard. Ils ont suivi le calendrier et l’itinéraire et ils sont là au bon moment !! Le monde entier observe la manif de mes cousins. Je les adore !!

Je ne sais comment va se terminer leur escapade, je lève ma trompe pour que tout se passe bien, et que les humains prennent conscience de l’importance de leurs revendications, qui concernent l’avenir des humains et des animaux, ainsi que de notre planète.

Je vous fais de gros bisous.

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “Planète trait d’union”

Bonjour chers enfants, comment allez-vous ?

Etes-vous sortis comme moi d’une nouvelle semaine d’écriture, pour vous à l’Ecole, au Collège ou au Lycée, pour moi par les lettres que je vous envoie chaque jour, un peu rincés de tant d’effort pour bien écrire, mais satisfaits d’avoir honorer le meilleur moyen de nous parler, d’apprendre l’un de l’autre ?

Mon cher voisin Henri me dit que, par chez vous, les descendants du plus grand inventeur de l’outil essentiel pour écrire, Monsieur le Baron Bich, ont installé une fabrique pour que les enfants et les adultes du monde entier puissent prendre plaisir à écrire, dessiner, gribouiller.

Que je suis heureuse d’apprendre cela, vous être au cœur de la création pour exprimer par le trait ce que vous ressentez, ce que vous comprenez, ce sur quoi vous vous posez des questions et cherchez à répondre.

Mister Kuttan, avec qui je parlais de ma passion de vous écrire chaque jour, m’a raconté combien, comme Ruby l’éléphante peintre, l’acte de tracer des traits est au fondement de la civilisation :

Kuttan me raconte que dans votre pays, une grotte préhistorique est admirée pour la capacité des premiers hommes à dessiner le monde.

Henri, qui se joignait à notre méditation sur cette si belle invention du trait d’union, me dit que pour se déplacer dans les grandes villes, les humains se servent de cartes à base de lignes.

Emmanuel, qui appelait pour passer le bonjour, nous a expliqué que très loin de chez moi, dans un pays appelé l’Australie, une très vieille civilisation avait inventé des dessins pour aider tout le monde à savoir comment se déplacer, comment reconnaître les endroits :

Kuttan, Henri et Emmanuel me disent qu’à deux dizaines de milliers de kilomètres de là, au même moment voici des milliers d’années, et sans pourtant rencontrer jamais le peuple aborigène, des humains ont eu la même idée de tracer des lignes pour représenter leur territoire.

Mon cher Henri, qui est passionné de Mister Darwin depuis que je lui ai fait lire ma lettre à votre attention… :

… Me raconte que sur les rives du grand continent rivant les îles où Mister Darwin a découvert d’incroyables tortues, d’incroyables lézards, vivaient il y a très très longtemps des humains qui ont eux-aussi tracer des traits pour dire le monde.

Kuttan me dit que ce grand continent s’appelle l’Amérique du Sud.

Il n’est pas du tout sûr que les humains de cet endroit là aient pu connaître mes ancêtres les mammouths, vivant plus au Nord de cette immense contrée d’après les dernières recherches de vous autres, les humains, mais ce qui est assuré, me dit Kuttan, c’est que les natifs du bord Ouest de l’Amérique du Sud ont inventé un système de lignes pour pouvoir compter, partager leurs calculs avec plein de personnes afin de commercer.

Hummm chers enfants, vous connaissez ma passion pour la mathématique :

Je barris de plaisir tant le trait permet d’écrire, de calculer, de lire, de retrouver ses racines en dressant son arbre généalogique :

Vive l’Amérique du Sud, Vive l’Afrique, Vive l’Australie, Vive l’Inde, Vive l’Europe ; Vivent toutes nos terres, continents trait d’union :

Je vous embrasse,

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “Mansa Moussa, le lion du Mali”

Chers enfants,

J’aime beaucoup vous parler de personnages, qui sont parfois oubliés, qui ont marqué l’histoire.

Dans une précédente lettre, je vous évoquais l’histoire d’Akbar, cet empereur moghol qui a régné sur mon pays de 1542 à 1605.

Akbar était reconnu pour son ouverture d’esprit, loué par notre grand économiste et penseur indien ; Amartya Sen parle d’Akbar et de son apport à l’Inde son grand pays :

Les débats intercommunautaires organisés par Akbar à la fin du XVIème siècle présentent deux particularités distinctives : l’acceptation de la pluralité (une multitude de croyances et de convictions étaient représentées), d’abord, et l’attachement au dialogue (l’insistance visionnaire d’Akbar sur la nécessité de faire en sorte que les représentants de religion différentes se rencontrent et conversent en témoigne), ensuite. Ces deux traits sont les caractéristiques indissociables de toute compréhension riche et intégrée de ce pays socialement si diversifié que l’Inde constitue.”

Mais dans ma lettre sur Akbar, j’ai oublié de vous dire que sa richesse était incalculable !!! Il fait partie des dix hommes les plus riches de tous les temps.

Mon cher voisin Henri a trouvé pour vous un article recensant cette liste incroyable :

Mansa Musa (1280-1337, roi de l’empire malien) richesse incalculable

Auguste César (63 AV JC-14, empereur romain) 4,6 milliards de dollars

Zhao Xu (1048-1085, empereur Shenzong de Song en Chine) richesse incalculable

Akbar I (1542-1605, empereur de la dynastie des Mughal de l’Inde) richesse incalculable

Andrew Carnegie (1835-1919, industriel écossais-américain) 372 milliards de dollars

John D. Rockefeller (1839-1937, magnat américain des affaires) 341 milliards de dollars

Nikolaï Alexandrovitch Romanov (1868-1918, tsar de Russie) 300 milliards de dollars

Mir Osman Ali Khan (1886-1967, prince indien) 230 milliards de dollars

Guillaume le Conquérant (1028-1087) 229,5 milliards de dollars“.

Aujourd’hui, je me suis intéressée à l’histoire de l’homme le plus riche, qui a vécu deux siècles plus tôt, en Afrique : Mansa Moussa était le roi du Mali. Mon ami Emmanuel a trouvé un article racontant cette histoire que peu de monde connaît.

Mansa Moussa était le roi du Mali, pas le territoire du Mali d’aujourd’hui, mais un territoire immense.

L’empire du Mali au 14ème siècle s’étend en réalité sur plusieurs des pays que nous connaissons aujourd’hui : le Mali, le Burkina Faso, le Sénégal, la Gambie, la Guinée, la Guinée Bissau, une partie de la Mauritanie, du Ghana et de la Côte-d’Ivoire. Au 14ème siècle, l’empire du Mali c’était tout ça. Et à cette époque, il rassemblait un ensemble de plusieurs royaumes.”

Moi l’éléphante très intéressée par l’Afrique, où vivent une grande partie de la famille des éléphants, cette histoire me montre l’histoire méconnue de ce grand et beau continent.

Nous autres, les Indiens, nous sommes fascinés par l’or : regardez les éléphants à Pooram, la fête de Thrissur, tout caparaçonnés d’or et de pierres précieuses !!

Notre temple de Thiruvananthapuram, avec son trésor de 14 milliards d’euros, trouvé il y a une dizaine d’années, et la chambre B, encore non explorée, montrent cet attrait que nous avons pour ce précieux métal.

Mansa Moussa, le Lion du Mali, était richissime, grâce aux mines d’or dont regorgeait le Mali.

Il était aussi réputé pour sa générosité, n’hésitant pas à le distribuer aux pauvres et l’utilisant aussi comme monnaie d’échange.

Sa générosité s’est manifestée lors du pèlerinage qu’il a fait à la Mecque en 1324, accompagné de soixante milles hommes, de douze milles serviteurs et de cent dromadaires. Chacun de ses sujets transporte de l’or et de la soie : cent cinquante kilos d’or pur pour chaque dromadaire et deux kilos chaque serviteur.

Mansa, qui signifie « le roi des rois », Mansa Moussa a tellement distribué l’or dans les villes où il passait, notamment au Caire, qu’il a provoqué une crise financière, faisant chuter la valeur de l’or. Son empire représentait la moitié des réserves d’or de l’ancien monde !!

Mansa Moussa a marqué aussi son époque par ses œuvres :

Le roi des rois est aussi un homme bâtisseur. Il fait construire par les architectes du royaume plusieurs bibliothèques – des madrasa –  comme celle de Sankoré située à Tombouctou. Une madrasa c’est quoi ? C’est l’équivalent d’une université. On y confère un enseignement scientifique aussi bien que religieux. Celle de Tombouctou est d’ailleurs considérée comme la 1ère université au monde. Les écrits montrent que cette madrasa possédait une des bibliothèques les plus riches de l’Afrique avec sept cents milles manuscrits, et également des mosquées comme la magnifique mosquée de Djenné qui reste aujourd’hui le plus grand édifice en terre cru au monde. Mansa Moussa fait de Tombouctou le carrefour des intellectuels et des poètes arabes et africains. “

Comme vous le voyez, chers enfants, l’Afrique est un continent incroyable, je sais que certains d’entre vous, alliez passer des séjours à destination de cet ancien empire du Mali, au Burkina Faso et au Maroc.

Je sais sûre que ce beau continent retrouvera la splendeur qu’il mérite et que son passé prestigieux sera mieux connu, tout en osant croire que ses richesses minières et autres profiteront aux africains.

Je vous fais de gros bisous.

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “La quête de ses origines”

Chers enfants,

Je vous parlais, dans une lettre précédente, de mes voisins qui ont quitté la côte Malabar et le sud de l’Inde il y a près de deux siècles pour aller travailler dans les Mascareignes, à l’île Maurice et à l’île de la Réunion. Leurs arrières, arrières petits enfants sont à la recherche de leurs ancêtres, ils sont intéressés de connaître le village ou la ville qu’ils ont quitté il y a très longtemps. Ils ont gardé un lien important avec la culture indienne et sont fiers de leurs origines :

Comme le disait si bien le chercheur, Monsieur Malbert :

Ce besoin de connaissance de soi à travers la connaissance de sa généalogie, ce travail sur les transmissions familiales est nécessaire à la construction identitaire de l’individu. Son éducation et son rapport au savoir en dépendent.”

En quelque sorte, pour être ouvert au monde, j’ai besoin de connaître mes racines. Pour moi l’éléphante très à l’aise dans mon petit pré de Kurichithanam, je sais que ma famille vit dans la montagne du Kerala, et que ma grand-mère dirigeait mon clan familial. Cela me réconforte quand Jis me donne des nouvelles de ma famille.

Chers enfants, comme pour moi, je suis sûre que vous avez besoin de connaître vos origines, cela nous concerne tous.

Madame Françoise Peil nous l’explique si bien :

La quête des origines est une notion fondamentale, inhérente à la nature humaine, car l’homme est sans cesse à la recherche des origines, quels que soient sa vie, son histoire, son destin.

Elle concerne le développement de tout enfant ; elle s’inaugure avec la curiosité sexuelle et la notion de « jardin secret » vécue comme une nécessité. Cette quête des origines est de plus en plus à l’ordre du jour depuis plusieurs années.

Combien d’entre nous se sont engagés dans un travail de généalogie ?

D’où venons-nous ? À quoi nous rattacher ? Où allons-nous ? À qui ressemblons-nous ? Cette dernière question est souvent posée par les enfants ne connaissant pas leurs origines biologiques.

Si cela prend un tour nouveau avec les nouvelles techniques, qui permettent de rattacher un individu à son parent par l’ADN, cette quête des origines préside à toutes les croyances, à toutes les religions. Comme l’écrit P.-C. Racamier (1990) : « Il ne suffit pas de naître, encore faut-il construire sa naissance au monde ; il ne suffit pas d’avoir reçu la vie, encore faut-il se la donner. »”

Voilà qui est nouveau, la science peut nous aider à connaître nos origines avec L’ADN, c’est vraiment incroyable.

Il paraît que cette découverte est plutôt récente.

En 1985, Sir Alec Jeffreys, docteur britannique en génétique, découvre la méthode d’identification par l’ADN (Acide DésoxyriboNucléique). La technique est commercialisée en 1987. Avec l’aide de la science, nous pouvons maintenant déterminer les origines ethniques anciennes de ses ancêtres patrilinéaires, en testant l’ADN du chromosome Y (appelé aussi ADN-Y ou Y-ADN) hérité de manière paternelle.

J’aimerais bien faire ce test ADN pour connaître mes origines, je me demande si dans mes ancêtres, je n’ai pas des éléphants d’Afrique !!

Kuttan me dit que récemment en Afrique, un petit éléphanteau perdu a pu être relié à sa maman grâce à l’enquête ADN réalisée par des humains bienveillants.

J’ai aussi entendu dire que ces tests ADN ne sont pas autorisés, chez vous, en France, alors qu’ils sont libres dans de nombreux pays :

Il n’existe à ce jour aucune réglementation européenne sur les tests ADN. Les tests génétiques dit récréatifs proposés sur Internet aux consommateurs pour connaître l’origine de leurs ancêtres ou dépister une maladie sont autorisés dans plusieurs pays européens comme au Danemark, à Chypre, en Finlande, en Allemagne, en Italie, au Luxembourg ou aux Pays-Bas mais interdits au Portugal et en France.”

Mon voisin Henri m’a raconté la belle histoire de Smaïn, cet humoriste de chez vous, qui fait son nouveau spectacle sur la quête de ses origines, abordant la technique des tests ADN.

J’aimerais tellement voir son spectacle, où il nous conte son enfance, abandonné à la naissance jusqu’à son adoption, que c’est touchant et comment il a dépassé toutes les épreuves de la vie, avec une formidable résilience.

Je suis sûre, chers enfants, que chacun de vous est capable de faire ce travail de connaissance de soi qui permet de se construire, avec l’aide de la famille et des adultes qui vous accompagnent.

Vous pouvez vous inspirer de Smaïn, qui mélange humour et réflexion sur sa vie.

Je vous fais de gros bisous,

A lundi,

Shila

Lettre de Shila : “Hommage à Sunderlal Bahuguna, l’homme qui a appris à embrasser les arbres”

Chers enfants,

Sunderlal Bahuguna, décédé il y a quelques jours du Covid-19 à l’âge de 94 ans, était connu du monde entier comme l’homme qui avait appris aux Indiens à étreindre et embrasser les arbres pour protéger l’environnement.

Grand militant pour la protection de l’environnement dans l’Himalaya, il était l’un des principaux porte-parole du mouvement Chipko, créé dans les années 1970. Chipko, en hindi, signifie “étreindre“.

Il s’est mobilisé avec de nombreuses femmes et de nombreux hommes de l’Himalaya indien, les invitant à s’enchaîner aux arbres pour empêcher les bûcherons de les abattre. C’était un symbole puissant véhiculant : “nos corps avant nos arbres“.

Il s’inscrit dans la tradition non violente de la protection des arbres, rappelant le sacrifice des trois cent soixante-trois Bishnoïs et de leur cheffe, Amrita Devi, tués en 1730 car ils s’opposaient à l’abattage des arbres, en les entourant de leur bras :

Mister Bahuguna et ses amis du mouvement Chipko avaient conscience que les arbres dans la montagne de l’Himalaya protégeaient les populations. La déforestation entraînait les glissements de terrain et des inondations.

Je vous parlais de ce mouvement Chipko dans une précédente lettre :

Mister Bahuguna a été l’un des premiers à faire le lien entre la coupe des arbres et l’assèchement des sources de l’Himalaya :

Il était un homme facile à vivre, doux et à la voix douce, ne cherchant pas la controverse, mais très déterminé.

Il est venu plusieurs fois de son état de l’Uttarakand au Kerala, faisant près de trois milles kilomètres pour soutenir les tribus et les agriculteurs qui s’opposaient à l’abattage des arbres centenaires dans le district de Wayanad.

Il aimait les paysages uniques de Wayanad, il se souciait de la protection de ses arbres, de son sol et de son eau, ainsi que de la communauté tribale marginalisée.

C’est une belle personne qui ne peut que nous inspirer à être attentif à notre environnement. Je voulais lui rendre hommage et vous encourager, chers enfants, à être conscients de l’importance des arbres. Je sais que vous avez le projet d’en planter autour de la ferme de Bertinghen, je suis fière de vous.

Je vous fais de gros bisous et surtout prenez soin de vous,

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “Les mécanismes du pleur”

Bonjour chers enfants, comment allez-vous ?

Hier soir pour m’aider à m’endormir, Mister Kuttan m’a relu le livre que j’aime tant, qui s’appelle « L’enfant d’éléphant » et dont je vous avais parlé :

A chaque fois, je suis touchée par le passage où le crocodile mord la trompe de l’éléphanteau, et quand le petit se met à pleurer.

Mais, est-ce que les éléphants sont capables de pleurer ? C’est vrai, quoi, c’est une grande question ; les humains ont observé des ruissellements sur nos joues, mais est-ce vraiment quand nous pleurons ?

La question reste controversée.

Il semblerait que nous autres ne pleurons pas, mais avons régulièrement chez les mâles cette capacité de signifier que nous grandissons et que cela fait quelque-chose à notre corps :

Les humains restent cependant incertains me dit mon cher voisin Henri ; ils restent troublés par des animaux qui expriment les sons des pleurs comme les bébés humains :

Emmanuel, qui appelait ce matin Kuttan et Henri pour prendre des nouvelles, me dit que chez les humains aussi, la question de savoir pourquoi on pleure est un sujet de grande préoccupation. Si j’ai bien compris, les bébés humains ont besoin de pleurer pour exprimer leur existence, et tenter de créer du lien avec d’autres que lui, et de grandir en toute sécurité.

Kuttan, Henri et Emmanuel m’expliquent aussi que le fait de pleurer, chez les humains, est universel ; que les larmes peuvent couler sur leurs joues quelles que soient leur condition, leur culture, leur éducation. Ce serait, si j’ai bien compris, l’un des éléments qui définit l’humanité :

Il semblerait que vous, les humains, êtes façonnés pour pleurer ; les grandes lacrymales que l’on retrouve dans le corps de bien des animaux sont pour vous un moyen de surcroît pour exprimer aux autres des émotions que vous ne parvenez pas à communiquer par d’autres moyens.

Hummm, très intéressant.

Je comprends mieux Henri et Emmanuel quand ils me racontent que le soir, vous pouvez pleurer parfois dans votre chambre, et que vos chères surveillantes de nuit, vos chers surveillants de nuit de votre maison viennent vous réconforter.

Si la nuit peut être une amie… :

… Elle peut être aussi le moment du retour des émotions, si fortes qu’il vous faille les exprimer pour demander une présence à vos côtés afin de mieux les comprendre, les accepter, et vous ré-endormir.

Chers enfants, je me dis que le fait de pleurer n’est pas forcément une mauvaise nouvelle ; il permet d’être entouré, d’être aidé, de trouver des solutions à la peine trop grande, mystérieuse, qui nous afflige.

Sachez que je suis toujours là, même en pensées, pour sécher vos larmes, discuter, y penser, et peut-être même : rigoler.

Je vous embrasse très fort,

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “À la recherche des ancêtres, la généalogie”

Chers enfants,

J’évoquais avec vous, dans une précédente lettre, les racines rurales que nous partageons dans nos pays si différents :

Je me suis intéressée à l’histoire de ces réunionnais et mauriciens qui veulent retrouver leurs racines indiennes à travers la connaissance de leur généalogie.

Ils veulent connaître qui était leur ancêtre qui a pris le bateau, il y a cent cinquante ans et plus, pour venir travailler à la Réunion ou à l’île Maurice. Ils veulent connaître l’Inde, qui étaient leurs ancêtres, leur vie avant le départ, leurs métiers… et le lieu d’où ils sont partis.

Ils veulent savoir qui est leur grand-père et comment parler de leurs ancêtres. 

Notre ami Emmanuel a trouvé un beau document qui parle de cette recherche des populations réunionnaises d’origine indienne, qui veulent retrouver leurs racines. 

Ce besoin de connaissance de soi à travers la connaissance de sa généalogie, ce travail sur les transmissions familiales est nécessaire à la construction identitaire de l’individu. Son éducation et son rapport au savoir en dépendent.” 

Pourquoi des Indiens sont-ils partis à l’île de la Réunion ou à l’île Maurice ou encore aux Antilles il y a plus de cent cinquante ans ??

Mon voisin Henri m’a expliqué que dans ces îles, les travailleurs dans les champs de canne à sucre étaient des esclaves, jusqu’en 1815, année de l’abolition de la traite des noirs !! L’abolition de l’esclavage est arrivée plus tard ; 1833 pour les colonies britanniques et en 1848, pour ce qui est de la France. 

Ces pauvres gens, originaires d’Afrique, avaient été vendus comme des objets, ils avaient perdu leur nom de famille et n’avaient aucun droit, même leurs enfants n’étaient plus considérés comme leurs enfants, ils étaient dépossédés de tout.

À partir de 1815, il fallait trouver de la main d’œuvre. C’est à partir de cette date que les Indiens pouvaient être engagés, avec des contrats de travail de trois ou cinq ans. Cet engagement n’était pas forcément si honnête qu’il paraissait, c’était une forme de servage. 

Madame Michèle Marimoutou, chercheure et historienne, donne une très belle explication du cadre de travail, appelé “engagisme“, dans lequel se trouvaient les ancêtres venant de l’Inde.

Les pays coloniaux, tels que votre pays, la France ou votre voisin britannique, recrutaient en Inde, où la France avait ses comptoirs coloniaux du sud de l’Inde à Mahé au Kerala ou à Pondichery et à Karikal au Tamil Nadu, l’Etat voisin de chez moi. 

D’ailleurs on appelle les Indiens, “malabares” ou malbars, en lien avec la côte Malabar !!

Dans son travail de chercheur, Monsieur Thierry Malbert explique “les réseaux de parenté et quête des héritages de l’Inde du Sud à la Réunion“.

La recherche de leur généalogie est plus difficile pour les populations d’origine indienne de la Réunion que pour celles de l’île Maurice. Les colons anglais, contrairement aux colons français, ont noté, en plus du nom de famille, le nom du village ou de la ville d’origine en Inde :

Si un grand nombre de Réunionnais se sont lancés sur les pistes de leur généalogie, la plupart, faute de transmission directe de la mémoire familiale, se sont trouvés confrontés aux impardonnables oublis des colons français qui n’ont pas inscrit le nom du village ou de la ville d’origine des engagés sur les registres. A l’île Maurice les Anglais avaient indiqué ces données, notamment les lieux d’habitation, les voisins, les biens, les terres ou productions commerciales. Seuls les Réunionnais dont les ancêtres sont passés par l’île Maurice, peuvent y avoir accès. De fait, nombreux sont ceux qui n’arrivent pas à faire le lien entre le port d’embarquement et le port d’arrivée : « on ne peut pas sauter la mer ».”

Mon voisin et ami Henri m’a dit qu’il a été invité à Armentières, non loin de chez vous, dans la communauté mauricienne d’origine indienne, lors de fêtes Diwali et Holi organisées par leur association, “Les mauriciens du Nord“.

En discutant avec plusieurs d’entre eux, Henri a compris qu’ils étaient passionnés de l’Inde, ils continuent à célébrer les fêtes indiennes et sont imprégnés par la culture et l’héritage reçus de leurs parents. Certains sont allés en Inde, dans la ville ou le village d’origine de leurs ancêtres, grâce à un organisme gouvernemental de l’île Maurice, qui a gardé les informations précises sur les familles et le lieu d’origine en Inde, au moyen d’un numéro de référence attribué à chaque famille. 

C’est incroyable, chers enfants, comment ces familles mauriciennes d’Armentières sont complètement intégrées dans le Nord de la France, tout en gardant l’héritage culturel indien, plus de cent cinquante ans après l’immigration de leur ancêtre arrivé à l’île Maurice au 19ème siècle et après une migration plus récente, au 20ème siècle de leur grand-père, venu de l’île Maurice à Armentières pour travailler dans le textile. 

Ce besoin de connaître sa généalogie pour aider à se construire individuellement, voilà un bel exemple donné par les mauriciens du Nord, vivant autour d’Armentières et aussi par les Réunionnais à la quête des héritages culturels de l’Inde. 

Emmanuel m’a fait savoir que la prochaine saison culturelle des enfants aura pour thème “Arborescence”, je suis sûre que vous allez découvrir plein de belles choses sur votre arbre généalogique. 

Je vous fais de gros bisous et surtout prenez soin de vous,

A demain, 

Shila

Lettre de Shila : “Chanson des terres froides”

Bonjour chers enfants, comment allez-vous ?

Mon cher voisin Henri me dit que par chez vous, les températures ne furent pas très élevées ces derniers temps. J’espère que vous n’avez pas pris froid.

De même qu’il faut savoir s’acclimater aux températures chaudes de mon pays, l’apprentissage du froid est une qualité dont peu peuvent se targuer dans le monde, et dans la grande histoire de notre Terre.

Je vous ai souvent parlé de l’Himalaya :

Des Sherpas :

Je vous racontais aussi que mes ancêtres s’appelaient « les mammouths », qui parvenaient à vivre sur des sols froids :

Et bien mon cher Kuttan m’a raconté que très très loin de chez moi, en Sibérie, vivent encore à ce jour des peuples extraordinaires dont l’existence est en péril en raison des grandes crises environnementales ; changement climatique faisant fondre les sols glacés, pollution dramatique qui peint les chiens en bleu :

J’aimerais vous parler de ces terres que je ne connais pas, mais qui parlent à mon cœur ; vous parler du peuple Iakoute, du peuple Nénètse, du peuple Sugpiaq.

Ces humains, ces plaines enneigées, glacées, et les animaux de là-bas sont si beaux,

La relation aux animaux, aux plantes qui poussent vaille que vaille, en un mot : à la nature, est au-delà de la difficulté à vivre ; elle me parle.

Les parents sont tellement affectueux pour leurs enfants. De même l’ouverture d’esprit pour accueillir les étrangers. et leur faire comprendre ce que cela fait de vivre dans le grand froid avec du chaud dans son cœur.

Emmanuel, l’ami de mon cher voisin Henri, me dit que vous aviez créé avec Misses Sonya et Mister Drew, venus par chez vous après des milliers de kilomètres pour honorer ensemble les masques sacrés conservés avec l’accord de leur peuple au Musée de Boulogne-sur-mer :

Alaska Passé / Présent

Emmanuel me raconte ces rencontres avec Sonya et Drew ; quelle chance vous avez.

Mes chers enfants, ces peuples sont hélas en train de perdre leur monde physique, tant le réchauffement accéléré et anormal des températures crée de graves perturbations dans le sol sur lequel ils vivent.

Que pouvons-nous y faire, nous autres les animaux, les plantes, vous autres les humains ?

Mon cher voisin Henri me dit qu’il est sans doute trop tard, et que ces personnes, ces animaux, ces végétaux devront quitter leur terre au risque de perdre leurs traditions ancestrales, fondées sur le nomadisme.

Vous voyez chers enfants, si je me réfère à la lettre que je vous ai envoyé à propos des tziganes, je me dis qu’il ne fait plus bon être nomades de nos jours :

Est-ce à dire que nous verrons disparaître pour de bon ces mondes du grand froid ? Emmanuel me dit que les humains pensent les très grands froids revenir sur terre, mais pas avant mille ans. Une fois dit cela, m’a expliqué Kuttan, la vie peut continuer à vivre sous des formes minuscules, hors de portée dans les grandes profondeurs sous la glace et c’est une grande découverte des temps récents.

Je vous envoie cette superbe chanson Iakoute pour que nous n’oublions jamais leur beauté, leur dignité, leur importance dans notre philosophie de la nature, leur noblesse de cœur, et que nous soyons à leur côté en ces temps incertains :

A demain,

Bisous,

Shila

Lettre de Shila : “Sur le pont”

Bonjour chers enfants, comment allez-vous ? Ce matin, des ouvriers sont venus poser un pont sur la rivière Kurianad, qui borde mon petit village.

Je ne sais si vous voyez, c’est un peu plus loin que la ferme des poissons.

Le vieux pont a très bien servi, mais à force de voir passer sur son dos des éléphants, des humains, des motos, des camions, il était temps de lui refaire une jeunesse.

Comme vous me connaissez, curieuse que je suis, j’ai regardé la prouesse technique pour fabriquer ce nouveau pont. C’est vraiment un bel ouvrage.

Mon cher Henri me dit que par chez vous, vous avez aussi plusieurs ponts enjambant un fleuve que vous avez appelé « La Liane ».

Ah d’accord, je vois que ces routes par-dessus l’eau sont essentielles à la vie de votre belle ville, de la mienne, et que les humains s’y sont consacrés depuis bien longtemps pour permettre aux riverains de rencontrer leurs voisins, de l’autre côté du fleuve.

Dans mon pays, nous avons plein de ponts, faits de toutes sortes, certains très très anciens.

J’ai une tendresse particulière pour chacun d’entre-eux, je trouve qu’ils ont tous un caractère, une personnalité. Et puis je pense aux efforts magnifiques des humains pour les édifier, les uns, les autres, présentant des défis à chaque fois singuliers (la hauteur vertigineuse, le flot puissant de l’eau à surmonter, que sais-je encore ?).

Alors certes, ce n’est pas en Inde que vous trouverez le pont le plus long du monde – qui se trouve en Chine.

Mais enfin, ça me laisse aussi songeuse et admirative que lorsque vous regardez le magnifique viaduc lors de vos ballades non loin des Maisons.

Emmanuel me dit qu’il reste ébloui par un viaduc construit à Millau, à neuf cents kilomètres de chez vous :

Quand il le traversa, il eut cette impression indélébile de rouler sur les nuages.

Ah, mes chers enfants, quelle joie, quelle réussite. Je vous souhaite construire moult ponts dans vos Maisons avec vos Kaplas dont je crois savoir qu’ils enchantent vos espaces communs.

Les ponts sont nos amis,

A lundi,

Bisous,

Shila

« When you’re weary

Lorsque tu seras las


Feeling small

Mélancolique

When tears are in your eyes

Lorsque les larmes viendront à tes yeux


I will dry them all

Je les sècherai toutes


I’m on your side

Je serai près de toi


When times get rough

Quand les heures deviendront rudes


And friends just can’t be found

Et que les amis demeureront simplement introuvables


Like a bridge over troubled water

Tel un pont enjambant l’eau trouble


I will lay me down

Je m’allongerai


Like a bridge over troubled water

Tel un pont enjambant l’eau trouble


I will lay me down

Je m’allongerai


When you’re down and out

Quand tu seras sur la paille


When you’re on the street

Quand tu seras à la rue


When evening falls so hard

Quand le soir tombera si rudement


I will comfort you

Je te réconforterai

I’ll take your part

Je prendrai ta défense


When darkness comes

Lorsque les ténèbres apparaîtront


And pain is all around

Et que la souffrance sera omniprésente


Like a bridge over troubled water

Tel un pont enjambant l’eau trouble


I will lay me down

Je m’allongerai


Like a bridge over troubled water

Tel un pont enjambant l’eau trouble


I will lay me down

Je m’allongerai


Sail on Silver Girl

Vogue Fille d’Argent


Sail on by

Vogue dans le sillage


Your time has come to shine

L’heure est venue pour toi de briller


All your dreams are on their way

Tous tes rêves vont s’accomplir


See how they shine

Vois comme ils brillent


If you need a friend

Si tu as besoin d’un ami


I’m sailing right behind

Je navigue juste derrière


Like a bridge over troubled water

Tel un pont enjambant l’eau trouble


I will ease your mind

J’apaiserai ton esprit


Like a bridge over troubled water

Tel un pont enjambant l’eau trouble


I will ease your mind

J’apaiserai ton esprit »