Archives de catégorie : Le service d’intervention pour le maintien a domicile et de retour progressif en famille

Le service d’intervention pour le maintien a domicile
et de retour progressif en famille

Concours inter-Maisons de la plus belle décoration de Noël : la candidature de la Maison du Cirque

Les Maisons lancent cette année la première édition d’un concours qui permettra aux enfants d’élire la Maison de l’association la mieux décorée pour Noël.

Une coupe, cédée gracieusement par Aurore, membre de l’équipe éducative de la Maison de la Danse à qui nous devons cette belle inspiration, sera remise à la Maison vainqueur : elle sera remise en jeu chaque année au moment des fêtes de Noël.

Découvrez la candidature de la Maison du Cirque (photos d’Elisa, membre de l’équipe éducative. PS : deux photos pirates sont incluses par Christophe, chef de service ; saurez-vous les reconnaître ?) :

Lettre de Shila (de la part du Petit Journal de Bombay) : “Accidents d’éléphants en Inde”

Chers enfants,

Je vous donne fréquemment des nouvelles de ma famille pachydermique, famille que j’aime, et qui se voit menacée par la déforestation, par le conflit avec des humains, braconniers ou ne supportant pas notre voisinage :

Le conflit entre les éléphants et les humains est très présent en Inde :

Les tensions qui existent entre les éléphants et l’Homme en Inde ont des conséquences fatales. On dénombre des milliers de morts et de blessés parmi la population indienne mais aussi chez les éléphants.”

Nos amis du petit journal de Bombay et du petit journal de Chennai viennent de publier un superbe article hier.

Allons donc voir ce qui se passe dans l’état du Tamil Nadu, grâce à l’enquête d’Isabelle et de son équipe très heureuses de vous la partager.

L’article fait le point sur ce conflit chez mes voisins et amis du Tamil Nadu.

Il faut savoir que la belle montagne des Ghats occidentaux où vivent mes cousins, est, dans sa partie plus au sud de l’Inde, partagée par les États du Kerala, du Tamil Nadu et du Karnataka.

Merci chère Isabelle, chère équipe.

Je vous fais de gros bisous et surtout prenez soin de vous,

A demain,

Shila

Lettre de Shila (de la part du Petit Journal de Bombay) : “Planète tigre”

Chers enfants,

Les enfants qui se rendaient à l’école KR Narayanan de Kurichithanam se sont arrêtés pour m’interroger ce matin.

Ils m’ont demandé quel est l’animal qui est le roi de la jungle : le tigre, le lion ou l’éléphant ??

Vous connaissez ma modestie naturelle, bien que je pense que c’est l’éléphante, je n’ai pas voulu trancher et je leur ai laissé le choix.

Dans la montagne des Ghats occidentaux où vivent mes cousins éléphants, vivent aussi des tigres.

Mon pays les protège depuis plusieurs dizaines d’années et grâce à cela, la population des tigres indiens augmente.

Vous savez que je suis en contact étroit et amical avec Isabelle rédactrice du Petit journal de Bombay.

Isabelle a rencontré Monsieur Geoffroy, qui a fondé « Planète Tigre ».

C’est une très belle histoire qui nous est contée, merci à Isabelle qui nous embarque dans cette planète.

Gros bisous à vous chers enfants et à Isabelle ainsi qu’à Monsieur Geoffroy pour son travail auprès des enfants et des tigres.

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “La peur”

Bonjour chers enfants, comment allez-vous ?

Pas trop froid en ce moment ? Henri m’a dit que par chez-vous les frimas de cette fin d’Automne sont gratinés. Couvrez-vous bien les enfants, et aussi mangez bien car c’est un bon moyen de résister aux aléas du temps mauvais.

Moi l’éléphante gourmande et curieuse de tout mange beaucoup de végétaux différents que m’apporte chaque matin mon cher Kuttan. Vous connaissez mes chères pousses de bambou. Ces derniers temps, je me prends aussi d’une passion pour les ananas :

Il faut vous dire que nous autres, les éléphants, ne rechignons pas à découvrir de nouveaux aliments, nous sommes mêmes les animaux les plus assurés dans la découverte d’autres goûts, d’autres substances alimentaires.

Mon cher Kuttan m’a expliqué que ce n’est pas forcément le cas pour d’autres animaux. Ainsi des oiseaux ; ils sont très très méfiants et réfléchissent à deux, trois, quatre fois avant de picorer ce qu’ils trouvent au pied des arbres.

Mais, de tous les animaux, me dit Kuttan, c’est sans doute le cheval le plus peureux. Cette créature a tout le temps besoin d’être rassurée, particulièrement aux aguets et inquiète lorsqu’elle broute.

Emmanuel, qui nous téléphonait pour passer le bonjour, me dit que les enfants des humains peuvent aussi développer cette peur s’exprimant lors du repas ; l’enfant refusant soit de manger même s’il aime les aliments, soit ne mangeant que très peu, ou toujours les mêmes plats.

Parmi les causes de peur des humains repérées depuis des siècles, il y a notamment la peur des arbres, des forêts.

Hummm, cette peur ne me semble pas très raisonnable. S’il existe des êtres bienveillants et apaisants, ce sont nos chers amis sylvestres. Emmanuel me dit que les humains ont développé de fausses croyances à propos de la forêt ; elle pourrait être le lieu des pires maléfices :

Ah oui, je me rappelle de cette lettre que je vous envoyais dissertant sur les cauchemars et leur interprétation :

Avoir peur des arbres, de la forêt, c’est non pas vis-à-vis de leur méchanceté ou monstruosité, mais de l’inconnu qu’ils représentent.

Mon cher Henri, passionné des arbres, nous a raconté que les humains scientifiques viennent de comprendre récemment que les arbres eux-mêmes pouvaient avoir peur, et développer des mécanismes de défense, de protection :

Emmanuel nous dit que s’il devait avoir peur des arbres, ce ne serait que pour la seule raison de ne pas les voir renaître à la vie au printemps, et que la feuillaison tant attendue n’ait lieu :

Chers enfants, la peur est un sentiment faisant partie du vivant ; il ne faut pas avoir peur de la peur, tout au moins savoir lui parler pour qu’elle sache nous laisser vivre une vie bonne.

Je vous embrasse,

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “L’arbre et la lignée”

Bonjour chers enfants, comment allez-vous ?

Hier après-midi, avec Henri, nous papotions de mes amis les arbres.

Henri venait de relire ma lettre à votre attention à propos d’Alexandre le grand et son influence en Inde :

Henri m’a dit que l’un des écrivains d’Alexandre, appelé Ctésias, avait beaucoup regardé les arbres, les plantes et essayé de les décrire.

Ah, ce cher Henri : comme Kuttan et Emmanuel, ils sont toujours à ruminer les lettres que je vous envoie, et puis ils m’en reparlent alors que je suis passée à autre chose. Bah, ça me fait plaisir quand même, mais bon, Henri : vis au XXIème siècle bon sang de bois !

Je vous avoue que j’avais un peu oublié cette lettre à propos de ma découverte de cet empereur envahissant il y a des milliers d’années ma contrée et racontant pas mal de sornettes pour renforcer sa puissance.

Henri, qui fumait sa bidî en regardant avec moi les beaux nuages de mon petit pré, me dit qu’après tout, Ctésias n’avait pas trop écrit de bobards à propos des plantes qu’il a vues lors de cette invasion.

Ainsi, me dit Henri, des acacias majestueux poussant dans le désert et décrits par Ctésias ; depuis la venue d’Alexandre, ces arbres ont essaimé par-delà mon continent et redonnent espoir à tous les humains œuvrant aujourd’hui pour l’avènement d’une muraille verte aux quatre coins du monde :

Bon, chers enfants, tout ceci, c’est de l’histoire très vieille.

Moi l’éléphante pas dupe ne suis même pas sûre que c’est vrai. Et puis, nous vivons deux mille ans plus tard. Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts : ces personnes dont me parle Henri, comment vous dire… Enfin bon, c’est Henri et ses rêveries.

Henri m’a raconté alors sa randonnée du côté d’un incroyable endroit non loin de chez vous, appelé Versailles. Si j’ai bien compris, cet endroit est un haut lieu de votre pays, car s’y sont trouvés de grands rois, un peu comme chez moi du côté du Radjahstan.

Henri me raconte les arbres incroyables qu’il a pu voir, témoignant de l’association très forte entre le symbole du pouvoir royal et l’arbre.

Lors d’autres randonnées, Henri a rencontré au contraire des arbres célébrant l’abolition de la royauté.

Emmanuel, qui téléphonait pour nous passer le bonjour, papote avec Henri de ce magnifique arbre qu’ils aiment tous deux, planté non loin de chez vous voici très très longtemps lors de négociations royales entre Angleterre et France de l’époque pour tenter de ne pas entrer en guerre :

Emmanuel nous raconte qu’hier soir, il a regardé un reportage passionnant à la télévision sur l’art de faire des arbres minuscules au pays des samouraïs :

Emmanuel nous dit qu’hélas les arbres géants d’Amérique sont quant à eux gravement menacés, et que ces feux gigantesques sont désormais un enjeu fort du développement des sociétés démocratiques.

Chers enfants, l’arbre c’est la vie, c’est notre Histoire, notre héritage, nos lignées. Qu’ils vivent à jamais.

Bisous,

A lundi,

Shila

Lettre de Shila : “La réduction de la pauvreté dans mon pays”

Chers enfants,

Comme chaque matin, je vois arriver mon cher Kuttan m’apporter quelques pousses de bambou fraîches et ce matin une boule de jaggery, vous savez, ce fameux sucre non raffiné dont je raffole.

Son deepika, sous le bras, j’ai tout de suite compris qu’il avait des nouvelles sympas à m’annoncer.

Le rapport du NITI Aayog (commission politique du gouvernement indien) vient d’être publié. Le dernier rapport concerne l’éradication de la pauvreté dans chacun des 28 États et 8 territoires de l’Union.

La joie de Kuttan est devenue aussi la mienne, quand il m’a dit que mon cher petit état du Kerala était, comme d’habitude, classé le premier, la pauvreté y est pratiquement éradiquée :

États de l’Inde avec le taux de pauvreté le plus bas :

Kerala : 0,71 %

Goa : 3,76 %

Sikkim : 3,82 %

Tamil Nadu : 4,89 %

Pendjab : 5,59 %

États les plus pauvres :

Bihar : 51,91 %

Jharkhand : 42,16 %

Uttar Pradesh : 37,79 %

Madhya Pradesh : 36,65 %

Meghalaya : 32,67 %

Territoires de l’Union avec le taux de pauvreté le plus bas :

Pondichéry : 1,72 %

Lakshadweep : 1,82 %

Îles Andaman et Nicobar : 4,30 %

Delhi : 4,79 %

Bien sûr, chers enfants, vous connaissez mon chauvinisme légendaire, je lève ma trompe et bats des oreilles quand j’apprends qu’il n’y a pratiquement plus de pauvres dans mon petit état, mais mon sentiment est partagé entre joie et tristesse, car je vois que le travail reste immense pour éradiquer la pauvreté dans de nombreux États de mon pays.

Mon grand voisin, KR Narayanan, premier président dalit de l’Inde, du 25 juillet 1997 au 25 juillet 2002, dont je vous ai déjà parlé et qui fait l’admiration de mon village de Kurichithanam, ce cher président ne cessait de rappeler que l’état du Kerala, dont il était natif devait servir d’exemple, notamment pour l’éducation.

Bien sûr, l’éducation est l’un des 3 éléments importants pour mesurer l’IPM (L’indice de pauvreté multidimensionnelle), les 2 autres éléments étant la santé et le niveau de vie :

L’IPM de l’Inde a trois dimensions également pondérées, la santé, l’éducation et le niveau de vie – qui sont représentés par 12 indicateurs de nutrition, mortalité infantile et adolescente, soins prénatals, années de scolarité, fréquentation scolaire, combustible de cuisson, assainissement, eau potable, électricité, logement, avoirs et comptes bancaires.”

Je voulais, chers enfants, partager avec vous, cette joie d’être entourée d’humains qui vivent de mieux en mieux.

Lorsque je suis au travail, tirant des troncs d’arbres dans les pentes plutôt abruptes dans nos collines, je croise fréquemment des femmes et des hommes qui coupent des épines et nettoient les bords de route et les fossés. Kuttan m’explique qu’ils sont employés dans le cadre de l’un des 4 programmes de réduction de la pauvreté en Inde pour le développement rural.

J’ai remarqué que ces femmes et ces hommes manifestent de la fierté dans ce service, d’autant qu’il leur permet d’être rémunérés et de vivre mieux.

Voilà encore une fois un sujet dont je suis fière, et que je me réjouis de partager avec vous.

Chers enfants je vous fais de gros bisous et surtout prenez bien soin de vous.

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “Mon incroyable voisine de 104 ans, Kuttiamma”

Chers enfants,

Vous savez mon amour pour les grands-mères, comme je vous l’ai maintes fois répété. C’est toujours la grand-mère qui dirige notre famille pachydermique, celle que les éléphants respectent et honorent :

Je vous ai déjà parlé de ces grands-mères indiennes qui font mon admiration, Nanammal, qui enseignait le yoga à 100 ans, Papammal, qui perpétue l’agriculture biologique à 106 ans, ou encore, Meenakshi Amma qui enseigne le Kalaripayattu.

Aujourd’hui, c’est une autre grand-mère qui m’inspire : Kuttiamma vient de réussir à 104 ans son examen d’alphabétisation.

Kuttiamma habite à Ayarkunnam, à 17 kilomètres de chez moi, elle n’a pas eu la chance d’aller à l’école étant enfant et n’a pas pu apprendre à lire et à écrire.

Vous ne pouvez pas savoir, chers enfants, comment c’est difficile de dépendre toujours des autres quand on n’a pas acquis la lecture et l’écriture.

Kuttiamma s’est dit qu’il ne faut jamais abandonner et baisser les bras, aussi elle a su que le gouvernement du Kerala a lancé un programme pour apprendre à tout âge. Ce programme de formation continue propose un examen d’alphabétisation (Kerala State Literacy Mission).

Elle vient de réussir brillamment son examen avec la note de 89 sur 100.

Croyez-moi, chers enfants, je lève ma trompe en son honneur, et je suis aussi fière de son exploit que je le serais pour quelqu’un qui a conquis l’Everest.

Il me faut aussi vous expliquer que mon cher petit état du Kerala est pourtant, depuis très longtemps, l’état le plus avancé de l’Inde pour l’alphabétisation :

Le Kerala arrive en tête de liste des États de l’Inde avec un taux d’alphabétisation de 96,2 %. Selon le recensement de 2011, près de 96,11 % des hommes et 92,07 des femmes étaient alphabétisés dans l’État.”

Mon voisin Henri me dit que lors de sa première visite en Inde, en 1978, il était très surpris de voir que les universités du Kerala étaient très proches de la population. À 2 kilomètres de chez moi, vous avez possibilité d’aller à l’université, comme chez vous à Boulogne, à l’université du littoral, créée en 1991.

Autant dire que le Kerala avait déjà décentralisé très tôt l’université pour favoriser l’accès de tous au savoir.

Le ministre de l’éducation et du travail du Kerala vient de rendre hommage à notre chère Kuttiamma :

Le ministre de l’Éducation et du Travail du Kerala, V Sivankutty, s’est rendu sur Twitter pour partager les réalisations de Kuttiyamma. « Kuttiyamma, 104 ans, d’Ayarkunnam, district de Kottayam, a obtenu 89/100 au test de la Kerala State Literacy Mission. L’âge n’est pas un obstacle pour entrer dans le monde de la connaissance. Avec le plus grand respect et amour, je souhaite le meilleur à Kuttiyamma et à tous les autres nouveaux apprenants”, a-t-il écrit sur la plateforme de microblogging, en joignant une photo de Kuttiyamma rayonnant du sourire édenté le plus attachant.”

Vous comprendrez, chers enfants, que pour moi l’éléphante philosophe de Kurichithanam, je ne pouvais pas laisser passer cette belle opportunité de vous compter l’histoire de Kuttiamma, cette sacrée mamie.

Je vous fais de gros bisous,

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “Les dolmens, ces pierres qui nous content l’histoire.”

Chers enfants,

Je vous écrivais hier sur la vie et les combats des adivasis, ces peuples qui vivent dans la forêt depuis des siècles.

Jis, ma chère voisine, qui fait de la recherche dans les forêts et connaît plusieurs de ces adivasis, est venue me voir lors de sa dernière visite à Kudakkachira. Elle m’a dit que la montagne et les forêts des Ghats sont habitée depuis des milliers d’années.

Elle était vraiment heureuse de me parler de Marayoor (Marayur), à 150 kilomètres de chez moi, dans cette montagne des Ghats occidentaux, à 1600 mètres d’altitude, où elle séjournait récemment.

À Marayoor, nous avons la chance d’admirer des dolmens qui nous disent que des humains vivaient là à l’âge de pierre, on y découvre aussi des peintures rupestres de la même époque.

C’est aussi le seul lieu du Kerala où poussent des forêts naturelles de bois de santal.

Autant vous dire que Jis avait du mal à cacher son enthousiasme et son admiration face à la richesse historique et archéologique de ce site qui nous fait remonter au Mésolithique et au Néolithique.

Emmanuel et Henri m’ont assuré que Monsieur Jean-Paul Demoule, le grand archéologue de votre conseil scientifique, serait très intéressé de faire un séjour à Marayoor. Il pourrait vous donner des explications sur les âges de pierre, de bronze et de fer. Il pourrait vous faire revivre cette grande période allant du Mésolithique au Néolithique, époque où les humains construisaient des dolmens.

Jis vous propose de découvrir, grâce à sa vidéo, ce site merveilleux de Marayoor, et de voir ses dolmens, sa forêt naturelle de bois de santal.

Elle filme aussi les champs de canne à sucre, importants à Marayoor pour faire le jaggery, ce sucre non raffiné qui me fait saliver juste en y pensant !!!

Mon voisin Henri et Emmanuel m’ont dit que c’est vraiment incroyable, qu’à une époque très ancienne, en France, comme au Kerala, les humains ont construit de très beaux dolmens.

À Carnac, en Bretagne, vous avez ces vestiges d’un lointain passé, pendant la période du Néolithique, qui servaient de tombeaux.

Ils étaient construits avec des grosses pierres posées à la verticale et couvertes par une immense pierre qui formait la toiture.

Ce qui m’a paru intéressant, c’est aussi l’origine du mot dolmen qui vient d’une langue régionale de chez vous, le breton : table (dol) de pierre (men). C’est un monument mégalithique (grosses pierres, en grec) fait de pierres brutes agencées en forme de table.

Kuttan de son côté était très intéressé, il avait déjà entendu parler des dolmens de Marayoor, mais jamais des dolmens de Carnac, en Bretagne, près de chez vous, ni des dolmens de Sicile, ni de ceux du Caucase et encore moins de ceux de Corée.

Cet âge de pierre nous fascine, les humains nous parlent au-delà des millénaires, nous racontent par l’agencement des pierres comment ils honoraient leurs morts, c’est beau.

La liste des pays du monde où il reste des dolmens est importante.

Je vois que la France comme mon pays sont riches de vestiges qui nous font remonter à plus de six ou sept mille ans.

Emmanuel et Henri m’ont aussi expliqué que vous avez gravé, avec Maki, une pierre qui va raconter votre histoire pendant une durée très longue, avec un petit déjeuner enfoui dans le sol, à la ferme de Bertinghen. C’est une superbe histoire.

Chers enfants, encore une fois, je me rends compte que notre histoire a d’incroyables points communs et cela me réjouis. Je remercie Jis pour le travail sur le site de Marayoor, qui nous a conduit des dolmens de mon petit état du Kerala à votre menhir de la ferme de Bertinghen.

Je vous fais de gros bisous,

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “Les adivasis, peuples autochtones habitants la forêt : peuples en lutte.”

Chers enfants,

J’ai demandé à mon voisin Henri et à Emmanuel qui demandait de mes nouvelles, si en France vous aviez des éléphants dans les forêts et si vous aviez des peuples autochtones vivant dans vos forêts en bonne entente avec les arbres, les plantes et les animaux.

Ils étaient surpris d’entendre ma question, mais cela nous a permis d’échanger sur ce sujet.

L’Inde est un grand pays, cinq fois plus grand que la France, et un cinquième du pays est couvert par la forêt, soit l’équivalent de la surface de la France !!!

Et les forêts indiennes sont très variées, il existe plusieurs types de forêts, allant des forêts tropicales du Kerala aux forêts de type alpin dans l’Himalaya en passant par les forêts épineuses du Rajasthan et les forêts humides des mangroves, dans les deltas ou le long des côtes.

Ce qu’il faut savoir, c’est que la plupart des forêts indiennes sont habitées depuis des siècles. À l’exception des zones inaccessibles de l’Himalaya, les adivasis, peuples autochtones ou aborigènes vivent dans et de la forêt. La surexploitation de la forêt est une réelle menace pour eux, ils sont sans cesse sur le qui-vive, et sont amenés fréquemment à résister.

Ces peuples autochtones vivent dans de nombreux pays du monde, en Amazonie, au Congo, en Malaisie…. En Inde :

Les peuples autochtones ou les aborigènes, comme leur nom l’indique, sont des habitants autochtones de la terre. Ils sont aussi appelés adivasis, vanvasis, etc. Depuis des temps immémoriaux, ils ont résidé dans les forêts, conservant ainsi la flore, la faune et l’ensemble de l’écosystème en général. Mais, ce sont eux qui ont été soumis à la plus grande injustice et à l’exclusion sociale.”

Une ONG, Survival International, défend le droit des peuples autochtones partout dans le monde :

Survival International est une ONG créée en 1969 dont l’objet est la défense des droits des peuples autochtones par le plaidoyer et des campagnes d’opinion en relayant la parole des peuples autochtones dans le monde, en lien étroit avec les organisations autochtones locales.”

Les publications de cette ONG sont très intéressantes pour comprendre la vie et les problèmes de ces populations.

Des dizaines de millions d’Adivasis dépendent des ressources forestières pour subvenir à leurs besoins, par la cueillette des fruits, fleurs, plantes médicinales, la collecte du miel ou du bois mort. Ces biens sont destinés à leur propre consommation ou au commerce.

Une loi votée en Inde, en 2006, reconnaît aux tribus d’adivasis et aux peuples traditionnels , le droit de vivre au sein de leurs forêts et d’en tirer les ressources nécessaires à leur survie ainsi que d’assurer la protection de leurs territoires.

Le préambule de la loi sur les droits forestiers (Forest Rights Act, en 2006) reconnaît que les Adivasis (aborigènes) ont été victimes d’injustices historiques, de déplacements et d’exploitation, et que la société se doit de leur restituer leurs forêts et de leur en donner l’accès, puisque leur survie en dépend pour récolter des fruits, des fleurs, du bois ou des feuilles.”

Cette superbe loi est malheureusement menacée, car il leur est difficile de s’opposer aux projets miniers, hydroélectriques ou autres qui affectent leur territoire.

À plus de 2000 kilomètres de chez moi à Hasdeo dans l’état du Chhattisgarh, les adivasis et les éléphants semblent faire peu de poids pour sauver la forêt qui pousse sur un gisement de cinq milliards de tonnes de charbon, même si la COP26 veut mettre un terme à l’utilisation du charbon qui entraîne le dérèglement climatique :

Sous la verdoyante forêt Hasdeo à Chhattisgarh, par exemple, il y a cinq milliards de tonnes de charbon – du charbon que les communautés locales sont déterminées à garder sous terre. Les Gond, les Oraon et les autres tribus vivant à Hasdeo savent ce que signifie l’extraction du charbon : les mines de charbon existantes ont détruit les terres et la vie des communautés voisines ; les populations locales d’éléphants déplacées entraînant des rencontres dangereuses ; et pollué l’eau et l’air, causant de graves problèmes de santé et d’environnement. L’exploitation minière planifiée à Hasdeo menace les terres de 18 000 personnes. “

À quelques centaines de kilomètres du Chhattisgarh, dans l’état du Jharkhand, c’est une autre résistance s’est organisée depuis 1994 pour s’opposer à l’armée qui tentait de prendre possession de leur territoire, un peu comme la lutte qui s’est faite chez vous, d’après les dires d’Henri et d’Emmanuel, sur le plateau du Larzac.

Depuis 27 ans, les adivasis se rassemblent chaque année pour défendre leurs terres, pour qu’elles ne deviennent pas un champ de tir de l’armée.

Vous allez me dire, chers enfants, que certains peuples, si proches de nous, dont la vie dépend de la forêt, comme mes cousins, les éléphants de la montagne, doivent mener sans cesse un combat pour leur survie.

C’est la réalité, mais pour moi l’éléphante philosophe, très sensible à leurs difficultés, je voudrais leur dire que, dans mon petit état du Kerala, nous avons pu, grâce à un combat qui a duré plusieurs années, de 1973 à 1979, conserver un lieu devenu sanctuaire de la nature, la Silent Valley, déclaré Parc national en 1985.

La forêt et la vallée auraient été détruites par la construction d’un immense barrage, sans ce combat mémorable.

Je suis très fière des habitants de mon pays, qui sait unir ses forces dans des combats pour la vie.

Ce combat rassemblait les habitants, les militants écologistes, des chercheurs… Comme le disait si justement notre grand poète Tagore, parlant du combat collectif, dans une jolie allégorie, on casse facilement une branche, mais il est impossible de casser un fagot !!!

Même si vous n’avez pas de voisins adivasis en France, je suis sûre que vous n’allez pas être indifférents à leur juste combat pour la vie et pour notre survie, en sauvant nos forêts, poumons de l’humanité.

Chers enfants, je vous fais de gros bisous,

A demain,

Shila

Lettre de Shila : “Caricaturiste, un métier à haut risque”

Chers enfants,

Vous savez mon intérêt pour les dessins, ceux qui décorent vos murs, ceux de l’éléphante Ruby, ceux qui décorent les camions en Inde…

Il existe cependant des dessins, appelés caricatures, faits par des artistes dont le but est de faire rire tout en faisant réfléchir. Ils travaillent souvent pour des journaux, et parfois ces caricaturistes font l’objet de menaces.

Leur métier est dangereux, car :

La caricature n’est pas qu’un dessin rigolo, c’est aussi l’une des armes que redoutent le plus les puissants. Les tyrans, les fondamentalistes ne peuvent régner que si on a peur d’eux. Ils dominent par la peur. Si vous riez d’un tyran, vous n’en avez plus peur.”

Henri m’a raconté sa rencontre avec Mister Anoop Radhakrishnan, lors d’un événement familial, le mariage de son petit neveu au Rajasthan, en février 2020.

Anoop est (cartoonist) caricaturiste, et se retrouvant en famille pendant plusieurs jours (la durée d’un mariage au Rajasthan est d’une semaine), Anoop et Henri ont eu le temps de parler de ce métier.

Dès le début de la conservation, Anoop a abordé le drame de Charlie Hebdo, et de l’assassinat de douze personnes dont cinq brillants dessinateurs, le 7 janvier 2015. Ce qui nous interroge sur la liberté de la presse.

Anoop laissait entendre que même dans les pays où la liberté d’expression est reconnue, la menace pèse sur les dessinateurs de presse, pouvant aller jusqu’à leur assassinat, comme ç’a été le cas en France.

Nous ignorions à l’époque qu’un autre assassinat allait toucher la France, en la personne de Samuel Paty, le 16 octobre 2020, ce valeureux professeur dont la mission était d’enseigner la liberté d’expression aux enfants.

Anoop est très engagé dans son métier de caricaturiste, il est secrétaire de la Kerala Cartoon Academy, et très reconnu par les siens.

Mais voilà qu’une de ses caricatures lui vaut des menaces. Une plainte a été déposée devant la haute cour de justice du Kerala, suite à son dessin sur un sommet médical imaginaire sur le Covid-19, montrant l’Inde représentée comme une “vache”, alors que l’Angleterre, la Chine et les États-Unis sont représentés comme des humains.

Anoop explique :

L’intrigue de la caricature était la suivante : en mars 2020, alors que les cas de covid augmentaient rapidement en Inde, la bouse de vache et l’urine de vache ont été largement proposées comme remède potentiel pour le Covid, ce qui était 100% non scientifique. Les dirigeants du pays proposaient également ce type de traitements médicaux superstitieux.

Je critiquais cette approche à travers mon dessin.”

La dessin d’Anoop a été honoré, cette année par un prix décerné par la Kerala Lalithakala Akademi, organisation autonome du gouvernement du Kerala, dont le but est de conserver et de promouvoir les arts.

Ce prix a entraîné une polémique, et a valu quelques menaces à son auteur.

Tout cela, chers enfants, me laisse trop triste, moi l’éléphante philosophe qui attache beaucoup d’importance au rire :

Comme le dit un avocat français, Richard Malka, défenseur de Charlie hebdo :

 “Eh bien, il faut continuer à rire et à sourire“,

Ou encore Mister Rusel, directeur du Cartoonists Rights Network International (CRNI), organisation établie à Washington qui défend la liberté d’expression des caricaturistes du monde entier :

Rire, ça semble simple, mais c’est la chose la plus puissante à faire.”

Mister Rusel poursuit :

« La caricature n’est pas qu’un dessin rigolo, rappelle-t-il, c’est aussi l’une des armes que redoutent le plus les puissants. « Les tyrans, les fondamentalistes ne peuvent régner que si on a peur d’eux. Ils dominent par la peur. Si vous riez d’un tyran, vous n’en avez plus peur. Et les caricatures, qui se moquent des riches et des puissants, font rire les gens. Et ça, c’est quelque chose que les tyrans ne supportent pas. »

Deux ennemis, moyennant quelques millions de dollars, peuvent s’affronter avec des chars d’assaut, des soldats, des fusils. Alors qu’un caricaturiste, avec seulement un crayon et une feuille de papier à trente sous, cause des dommages considérables… « En termes d’efficacité et de coût de revient, le caricaturiste assis à son bureau est un type d’ennemi dévastateur pour un tyran ! », dit M. Russel.

Et le dessin a une force de frappe plus importante que les mots, estime Robert Russel. « Lorsque vous lisez le journal et que vous allez à la page de l’éditorial, vos yeux sont attirés par la caricature. Même si vous lisez puis oubliez l’éditorial, vous allez vous souvenir de la caricature. Ces images restent collées dans notre esprit. »

Alors, oui, dit Robert Russel, il faut continuer à rire. « Il faut continuer à rire, continuer à vouloir voir ces dessins, continuer à défendre la liberté d’expression même si ça nous heurte, parfois. Avoir de l’imagination, une pensée, des opinions, c’est essentiel à la survie de l’humanité.”

En dessinant sur des thèmes aussi forts que la religion, l’économie, la finance, la politique, la guerre…

Les caricaturistes sont appelés justement “fantassins de la liberté”, par Stéphanie Valloatto en 2014.

Dans son film, elle les présente comme défenseurs de la démocratie et de la liberté d’expression, en s’amusant avec comme seule arme, un crayon, au risque de leurs vies.

 “Ils sont : français, tunisienne, russe, américain, burkinabé, chinois, algériens, ivoirien, vénézuélienne, israélien et palestinien” … (et aussi indien).

Ils testent en permanence le degré démocratique de leur pays et s’exposent en première ligne, ils sont bien les fantassins de la liberté.”

Oui, chers enfants, moi l’éléphante qui aime tant la liberté, j’ai entendu qu’un poète de chez vous, Paul Eluard a écrit un sublime poème, “Liberté, j’écris ton nom” :

« Sur mes cahiers d’écolier

Sur mon pupitre et les arbres

Sur le sable sur la neige

J’écris ton nom

Sur toutes les pages lues

Sur toutes les pages blanches

Pierre sang papier ou cendre

J’écris ton nom

Sur les images dorées

Sur les armes des guerriers

Sur la couronne des rois

J’écris ton nom

Sur la jungle et le désert

Sur les nids sur les genêts

Sur l’écho de mon enfance

J’écris ton nom

Sur les merveilles des nuits

Sur le pain blanc des journées

Sur les saisons fiancées

J’écris ton nom

Sur tous mes chiffons d’azur

Sur l’étang soleil moisi

Sur le lac lune vivante

J’écris ton nom

Sur les champs sur l’horizon

Sur les ailes des oiseaux

Et sur le moulin des ombres

J’écris ton nom

Sur chaque bouffée d’aurore

Sur la mer sur les bateaux

Sur la montagne démente

J’écris ton nom

Sur la mousse des nuages

Sur les sueurs de l’orage

Sur la pluie épaisse et fade

J’écris ton nom…

Sur la vitre des surprises

Sur les lèvres attentives

Bien au-dessus du silence

J’écris ton nom

Sur mes refuges détruits

Sur mes phares écroulés

Sur les murs de mon ennui

J’écris ton nom

Sur l’absence sans désirs

Sur la solitude nue

Sur les marches de la mort

J’écris ton nom

Sur la santé revenue

Sur le risque disparu

Sur l’espoir sans souvenir

J’écris ton nom

Et par le pouvoir d’un mot

Je recommence ma vie

Je suis né pour te connaître

Pour te nommer

Liberté »

(Paul Eluard, Poésie et Vérité, 1942)

Chers enfants, le mot “liberté” est, m’ont dit Emmanuel et Henri, écrit sur les frontons de vos mairies, avec “égalité et fraternité”. C’est très fort.

La liberté d’expression fait partie de cette liberté qui malheureusement est un combat difficile. Je lève ma trompe pour saluer tous les fantassins de la liberté, à commencer par les courageux caricaturistes.

Je vous fais de gros bisous,

A lundi,

Shila