Bonjour les enfants,
Pas trop mouillés par les pluies dont mon cher voisin Henri me signale l’abondance ces derniers jours par chez vous ? Avec des températures en baisse, vous pourriez peut-être espérer de la neige sur vos belles collines. Ça au moins c’est rigolo : faire de la luge, des batailles de boules de neige à n’en plus finir, construire des bonhommes de neige à qui mieux mieux.
A propos des bonhommes de neige, j’ai une histoire à vous raconter : c’est l’histoire de « l’abominable homme des neiges ».
Ça s’est passé dans l’Himalaya, vous savez ? Le pays des Sherpas dont je vous parlais cette semaine. Alors voilà, voici presque soixante-dix ans, un explorateur britannique : Mister Eric Shipton tente de gravir l’Everest, la plus haute montagne du monde chère à Ang Rita. Il essaye pour y parvenir un chemin qui n’est pas habituel lorsqu’il voit dans la neige des empreintes de pas incroyables, d’une taille gigantesque (trente-trois centimètres). Il fait des photos de cette trace extraordinaire, et très vite la presse du monde entier parle d’une découverte sidérante : la preuve qu’un géant bien plus grand que les humains existe sur cette Terre et habiterait les montagnes entre le Nepal et le Tibet.
De génération en génération, les anciens du peuple Sherpa parlaient à leurs familles d’une silhouette humaine, gigantesque et poilue qu’ils avaient vue au loin, courant pour les fuir. Les Sherpas ont appelé « Yeti » cette créature (qui veut dire « homme sauvage » dans leur langue).
Mes chers enfants, vous connaissez mes doutes sur notre capacité à penser le sauvage sans en avoir peur, sans le voir comme un ennemi qu’il faut à tout prix asservir. Je vous en avais fait part à propos de cette île mystérieuse à l’Est de mon pays :
Et bien, pour le Yeti, ce fut hélas de nouveau la même convoitise : dès la parution des photos de Mister Shipton, des expéditions furent organisées pour tenter de capturer à tout prix cette créature mi-homme mi-animal. Emmanuel, l’ami de mon voisin Henri, m’a envoyé pour vous un article qui raconte cette traque du Yeti, de 1950 à nos jours.
D’après les dernières analyses des traces trouvées dans ces hautes montagnes, le Yeti serait en fait un ours dont les scientifiques qui font le même travail que ma copine Jis ne connaissaient pas encore l’existence.
Affaire résolue ?
Pas du tout, car au centre de la Chine et sur la côte Ouest des Etats-Unis, des humains signalent aussi et avec certitude avoir vu des créatures mi homme – mi animal analogues au Yeti : le Yeren pour les chinois, le Bigfoot pour les américains.
Personne ne les a rencontrées pour de vrai, mais des expéditions sont organisées encore aujourd’hui et des dessins d’eux sont relayés dans la presse, souvent pour prévenir de leur prétendue dangerosité.
Enfin, il me faut nuancer : le Yeti peut aussi être présenté comme un personnage finalement amical malgré ses apparences monstrueuses.
Mes chers enfants, cette énergie déployée par les humains pour mener des enquêtes sans fin me fascine.
Moi, l’éléphante philosophe, je me dis que trouver le Yeti n’est finalement pas ce qu’espèrent les humains : l’important, me semble-t-il, c’est plutôt pour eux de le chercher sans cesse, même s’ils ne le trouvent jamais. Emmanuel me dit que cette partie de cache-cache où il n’y a jamais de gagnant est à la base de ce qui est appelée « la croyance ».
Je me dis que souvent chez les humains, croire est plus important que savoir. Je ne sais pas si cela est bien ou si c’est mal. Je pense que si cela aide à avancer dans la vie, à lui donner un sens, pourquoi pas ? L’important, c’est de croire de manière pensée, c’est-à-dire d’interroger chaque jour ses raisons de croire.
Je vous embrasse très fort les enfants, vivement la neige !
A lundi,
Shila