Lettre de Shila : “La recherche spatiale en Inde ISRO, 60 ans d’une grande aventure”

Chers enfants,

Comme je vous le racontais avant-hier, chaque nuit si étoilée de décembre, j’admire le ciel avec sa voie lactée et la lune paraît parfois si proche que j’essaie de la décrocher avec ma trompe !!

Mais savez-vous que la première fusée indienne a été lancée en 1963 de Thumba, à 172 kms de chez moi, tout près de Thiruvananthapuram (Tivandrum) ?

Le choix de Thumba a été fait par l’agence spatiale de l’Inde, L’ISRO (Indian Space Research Organisation), c’est l’agence spatiale de l’Inde. Elle est la principale organisation indienne chargée de mettre en œuvre le programme spatial de l’Inde en concevant et en exploitant les satellites et les lanceurs nationaux.

Thumba est comme pour vous la station de Kourou en Guyane, située près de l’équateur et en bord de mer.

La station de lancement de fusée équatoriale Thumba (TERLS) est un port spatial indien créé le 21 novembre 1963. Exploité par l’Organisation indienne de recherche spatiale (ISRO), il est situé à Thumba, Thiruvananthapuram, près de la pointe sud de l’Inde continentale, très proche de l’équateur magnétique terrestre. Il est actuellement utilisé par l’ISRO pour lancer des fusées-sondes.

L’agence spatiale indienne a été créée au début des années 60 par le premier ministre de l’Inde, Monsieur Nehru et de grands scientifiques indiens dont le Docteur Vikram Sarabhai, considéré comme le père du programme spatial indien. Il va diriger l’agence spatiale, jusqu’à sa mort en 1971.

Ce qui est incroyable, chers enfants, c’est de voir ce pays qui se lance dans cette aventure spatiale, alors qu’il vient d’avoir son indépendance une dizaine d’années plus tôt et que ce pays a été appauvri par plus de deux siècles de colonisation. Mon ami Henri se souvient avoir lu un article du monde diplomatique expliquant que la Chine et l’Inde possédaient chacune 25% de la richesse mondiale avant la colonisation et que deux siècles plus tard, la Chine ne possédait plus que 5% et l’Inde seulement 3% de cette richesse mondiale.

Autant vous dire que le pari de l’Inde était perçu comme insensé.

Un pays exsangue, ayant toute une infrastructure à construire : routes, ports, aéroports…, nourrir une population de plus de 600 millions d’habitants, comment ses dirigeants osent-ils se lancer dans la conquête spatiale ?? Moi l’éléphante perspicace, je suis admiratrice des dirigeants et chercheurs visionnaires de mon pays ; ils étaient des pionniers dont on peut dire, avec Oscar Wilde : “nous sommes tous dans le caniveau, mais certains d’entre nous regardent les étoiles.” Leur histoire est celle d’une Inde, nouvellement indépendante qui ose rêver en grand : “vous ne commencez pas par des objectifs à remplir, vous commencez et ensuite vous créez de nouveaux objectifs qui sont dans l’esprit de ce que vous vouliez faire“, disait EV Chitnis, scientifique indien, résumant l’état d’esprit de la recherche spatiale indienne dans son humble début en 1963. 

Je vous invite à regarder les photos ci-dessous où vous pouvez voir diverses parties de la première fusée indienne, transportées à vélo ou en charrette tirée par les bœufs !!

L’une des photos, le nez de la fusée sur le porte-bagage du vélo, été prise par un grand photographe de chez vous, Henri Cartier-Bresson.

Vous avez aussi une photo de rencontre importante, sous les cocotiers du Kerala, où Vikram Sarabhai, le père du programme spatial, donne une conférence devant Madame Indira Gandhi, premier ministre de l’Inde, devant Monsieur Namboodiripad, le chef ministre communiste du gouvernement du Kerala et JRD Tata.

C’est absolument incroyable de voir un monde à la fois sortant du Moyen-âge et entrant dans le 21ème siècle !!!

Depuis le 21 novembre 1963, date à laquelle a été lancée la première fusée indienne, la recherche a poursuivi son formidable parcours : l’agence spatiale de l’Inde s’est beaucoup développée, appelée en 1962 INCOSPAR (comité national pour la recherche spatiale) puis en 1969 ISRO (organisation indienne de la recherche spatiale).

L’ISRO a maintenant plusieurs sites de lancement de fusées en Inde ; elle a lancé de nombreux satellites, et comme toute grande entreprise, elle continue avec ses réussites et aussi ses échecs.

Dans les années 70, le centre spatial Satish-Dhawan, à Sriharikota, 80 kms au nord de Chennai (Madras), est devenu la base de lancement d’ISRO, l’agence spatiale indienne.

C’est de ce centre spatial que sont lancés cinq satellites par an, avec réussite mais aussi parfois avec des échecs.

L’an passé en juillet 2019, l’Inde a lancé sa fusée Chandrayaan-2, avec pour objectif de faire atterrir Vikram.

Mon cher voisin Henri m’a envoyé pour vous un article qui explique bien la mission : elle aurait permis à l’Inde d’être la quatrième puissance, après les Etats-Unis, la Russie et la Chine, à faire atterrir une sonde sur la Lune, mais Vikram s’est crashé dans l’alunissage ou atterrissage, comme l’ont raté les européens et Israël !!

L’échec fait partie de la vie et de la recherche, mais il doit servir à rebondir, à repartir, à se relever, c’est la force des pays et aussi de chacun de nous, humains et animaux : “tomber, mais se relever : l’instinct de survie”, ma lettre d’hier, est toujours d’actualité.

Je vous fais de gros bisous.

A lundi,

Shila