Lettre de Shila : “L’atelier”

Bonjour chers enfants, comment allez-vous ? Emmanuel m’a dit que mercredi, comme chaque mois cette année, vous avez rejoint l’atelier de Fabrice, Thierry, et Christophe pour construire une charrette d’il y a six cents ans :

Génial, bravo les enfants ; je vous admire. J’espère être avec vous pour voir rouler cette charrette quand vous l’aurez terminée, vous connaissez ma passion pour tout ce qui roule :

Du coup, je me suis rapprochée de l’atelier qui est à deux pas de la maison bordant mon petit pré.

Quel foutoir !

Son occupant était très affairé à l’établi. Je n’ai pas osé le déranger. Je me demande comment il sait s’y retrouver dans son atelier avec tout ce bric-à-brac.

Mon cher Kuttan, qui me portait mes chères pousses de bambous, m’a raconté qu’un jour, cette personne l’a invité à bricoler avec elle dans son atelier. Kuttan m’a dit que cet humain a tout le temps plein d’idées en regardant ces amoncellements d’objets. 

Je ne sais pas comment il fait : c’est bien mystérieux tout ça.

Kuttan a appelé Emmanuel pour lui expliquer mon embarras.

Emmanuel m’a dit au téléphone qu’il ne fallait pas que je rumine plus que de raison ; souvent des ateliers incroyablement dérangés furent au cœur du génie de la création humaine. Mais il y aussi des ateliers un peu plus rangés. Et aussi des ateliers dépouillés, où ne se trouvent que l’humain et son seul outil désiré :

Emmanuel, entre deux coupures de téléphone, a réussi à me dire que le cerveau des êtres vivants est fait pour apprendre, mais qu’il a besoin d’être aidé pour réussir ces apprentissages, et c’est pour ça que les objets, les lieux, sont si importants :

Hummm, très intéressant.

Le propriétaire de l’atelier, sortant de sa cabane, a écouté avec Kuttan la discussion au téléphone que j’avais avec Emmanuel. Mon cher voisin Henri, remarquant dans le pré notre attroupement, nous a rejoint.

Henri nous a dit que la créativité pour utiliser des choses qui n’ont pas de relations entre elles n’était pas l’apanage des humains ; moi aussi, l’éléphante, je serais capable de trouver un sens à tout ce qui se présente devant moi, chemin faisant. Le monsieur de l’atelier a répondu qu’Henri avait raison.

Ouille ouille ouille, je ne me sens pas à ma place dans ces discussions entre humains. Certes je m’étais regardée dans le miroir et m’y suis reconnue, mais je ne savais pas que vous autres les humains considérez que mon intelligence se manifeste aussi par ma capacité à trouver des objets pour les faire miens.

Henri et Kuttan, voyant mes joues rougissantes, ont voulu me réconforter et m’ont aussi expliqué qu’un Monsieur ; Monsieur Duchenne, ayant vécu à Boulogne-sur-mer pas loin de chez vous, avait inventé dans son atelier la technique pour lier les émotions et la pensée. Kuttan m’a expliqué que les plantes sont toutes aussi créatives pour trouver des solutions à partir du lieu où elles vivent.

L’atelier est bien le lieu pour faire naître les idées.

Merci chers Monsieur de l’atelier, Kuttan, Henri, Emmanuel : je reprends mes esprits grâce à vous. Chers enfants, est-ce que cette façon de penser appelée « la fabrique de l’atelier » est aussi la vôtre ?

Henri m’a dit que les jeunes indiens étaient passionnés de jeux vidéo qui font appel à la capacité de développer des villages, ou des stratégies pour gagner des matchs tout au long de la saison :

Emmanuel m’a dit que vous étiez tout aussi fans que mes compatriotes de jeux pour construire des Maisons.

Hummm, je m’en réjouis : la créativité est la capacité à créer des associations d’idées, d’objets, de personnes, et vous êtes fortiches pour ce faire.

Belles vacances bien méritées chers enfants, je vous envoie cette rêverie fruit de tant de travail dans des ateliers du monde entier :

Au lundi 8 mars,

Bisous,

Shila