Chers enfants,
Je vous parlais, la semaine dernière, du 11 novembre, journée consacrée au souvenir d’une guerre terrible, afin que jamais ce désastre ne puisse de nouveau arriver.
Je voudrais aujourd’hui honorer mes compatriotes, ces jeunes soldats indiens qui se sont engagés dans le corps indien de l’armée britannique appelé Indian Army, il y a plus de cent ans. Ils étaient jeunes et espéraient un bel avenir.
Ils étaient tous du Nord de mon Pays, principalement du Penjab (50%) et des autres régions du Nord de l’Inde, ainsi que du Népal.
La composition du corps expéditionnaire en France reflétait celle de l’Indian Army, soit 40% de Musulmans, 30% d’Hindous, 19% de Sikhs, 10% de Gurkhas (Népalais) et 1% d’autres.
Leur participation à la Première guerre mondiale a été une cruelle épreuve pour ces jeunes, ils n’étaient pas du tout préparés à affronter un tel conflit dans un climat où l’hiver est glacial et dans les tranchées où certains d’entre eux ont eu les pieds gelés…
Cependant pour nombre d’entre eux, ils ont eu une fenêtre ouverte sur le monde et ils l’ont exprimé dans leurs courriers, même si leurs lettres étaient en partie censurées.
138 000 soldats indiens ont servi en France et en Belgique entre 1914 et 1918. 8500 d’entre eux y ont laissé leur vie et quelque 50 000 ont été blessés (dont plusieurs mutilés à vie ou gazés), tout cela pour venir défendre notre pays, très loin du leur.
C’est surtout entre 1914 et 1915, que ces hommes ont été sur le front entre Ypres et La Bassée. Les autorités ont pris la décision de leur faire quitter le front après l’hécatombe et de les déplacer :
“Les pertes sont telles que la question du maintien des soldats indiens sur le Front de l’Ouest se pose. Dès l’automne 1915, les rescapés du Corps Indien sont progressivement relevés. Direction le Moyen-Orient. Seules deux divisions de cavalerie seront gardées en réserve, dans le Nord, jusqu’à la fin de la guerre.”
Deux lieux de mémoire sont très importants dans le département du Pas de Calais, Neuve-Chapelle-Richebourg et Saint-Martin Boulogne.
À Neuve-Chapelle-Richebourg où 4000 soldats indiens ont péri en mars 1915, un mémorial leur a été construit pour honorer leur mémoire.
À St Martin Boulogne, le cimetière indien, Meerut cemetery, est le lieu où reposent 311 soldats et officiers indiens, morts à l’hôpital militaire de Saint-Martin (Meerut Stationnary Hospital), suite à blessures, pneumonies….
Voilà ce que dit Sébastien Chochois :
“Entre-temps de nombreux soldats sont morts, souvent de maladie, dans l’hôpital militaire de Saint-Martin (Meerut Stationnary Hospital). On compte 279 tombes plus 32 noms sur le mémorial de ceux qui ont été incinérés selon le rite funéraire hindou. « Il y a aussi 26 tombes de travailleurs égyptiens décédés en 1917 », précise Sébastien Chochois, alors responsable des archives de la ville de Saint-Martin-Boulogne.”
Sébastien Chochois, depuis maire d’Outreau où vous avez plusieurs de vos maisons, a contribué à mieux faire connaître ce lieu du souvenir et havre de paix qu’est le Meerut cemetery de Saint-Martin Boulogne, contribuant ainsi à honorer ces jeunes soldats indiens morts pour notre pays.
Christian Baly, ancien maire de Saint-Martin Boulogne, doit aussi être salué pour sa décision d’honorer ces hommes en déposant une gerbe et en se recueillant chaque 11 novembre au cimetière indien, depuis 2009.
Chers enfants, n’hésitez pas à vous rendre au Meerut cemetery de Saint- Martin, à moins de 2 kilomètres de la ferme de Bertinghen. Vous vous trouverez dans un lieu de mémoire unique, d’une grande beauté et plein de sérénité.
Chaque pierre tombale nous raconte l’histoire de chaque homme reposant à Saint-Martin Boulogne, elle nous donne le nom de l’homme, une écriture très précise nous dit son appartenance, l’écriture ourdoue pour les musulmans, hindi pour les hindous (“Om (ou Aum ॐ)”) et une icône de sabres croisés pour les sikhs…
Vous pouvez aussi lire sur la pierre la fonction du soldat : “sepoy” (cipaye), “driver” (chauffeur), “shoeing smith” (maréchal ferrant)… Vous pouvez ainsi recenser des dizaines de métiers exercés par ces hommes, prenez un dictionnaire pour traduire de l’anglais !!
Vous avez aussi la date exacte du décès de chacun d’entre eux.
Il nous faut aussi remercier l’autorité administrative, Commonwealth War Graves Commission, qui entretient merveilleusement les cimetières militaires du Commonwealth.
Quelle beauté que ces arbres, pelouses, fleurs et pierres tombales si bien entretenus !
Il me faut aussi saluer Sir Herbert Baker, l’architecte qui a conçu le cimetière indien de Saint-Martin Boulogne et le mémorial indien de Richebourg.
Ce grand architecte britannique a réalisé de nombreux ouvrages en Inde et partout dans le monde.
Son œuvre à Saint-Martin Boulogne nous aide à trouver paix et sérénité, Emmanuel et Henri aiment se rendre régulièrement dans ce beau lieu de mémoire.
Pour terminer, chers enfants, il me faut évoquer ces coquelicots que vous pouvez voir dans le cimetière indien mais aussi à la boutonnière de vos voisins britanniques, ce poppy (coquelicot) est porté en l’honneur des soldats morts pendant cette triste guerre.
Je vous ai déjà parlé de ce poète et médecin canadien, qui repose à quelques kilomètres de Saint-Martin Boulogne, dans le cimetière de Wimereux, John Mac Crae, auteur du poème fameux qui a fait du coquelicot un symbole du sang versé par les soldats pendant cette 1ère guerre mondiale si meurtrière.
Chers enfants, je sais que vos activités artistiques et culturelles vous prennent beaucoup de temps, mais sachez que si vous le désirez, vous avez autour de chez vous des lieux qui sont des champs du souvenir et d’une histoire qui nous lie.
Je vous fais de gros bisous,
A demain,
Shila