Bonjour chers enfants, comment allez-vous ?
Ce matin, mon cher Kuttan, après m’avoir déposé mon petit-déjeuner, a allumé quelques feux au pieds de la végétation bordant mon petit pré car elle est galopante et il faut régulièrement l’aider à ne prendre pas trop d’ampleur. Je suis habituée à ces petits incendies sous la surveillance de Kuttan, mais je dois vous dire que ce matin j’ai eu un peu peur car à un moment, les flammes se sont un peu rapprochées de la maison de mon cher voisin Henri. Henri et Kuttan ont veillé à ce que cela ne dégénère pas en catastrophe, mais bon, sur le moment je dois vous avouer que j’ai pensé que tout était fichu.
Ce qui m’impressionne beaucoup chez Kuttan, c’est qu’il sait qu’il faut régulièrement brûler des plantes pour qu’elles puissent vivre mieux ensuite.
Moi, je me dis que quand c’est brûlé, c’est brûlé, et qu’il n’y aura plus jamais mes chers bambous. En fait non ; à chaque fois je suis émerveillée de constater que les plantes repoussent si bel et bien qu’il faudra à nouveau que des feux soient allumés et ainsi de suite pour que tout le monde s’y retrouve. Henri m’a expliqué que vous autres, les humains, avez beaucoup réfléchi à ce cycle de la vie, où quelque-chose disparaît pour permettre à quelque-chose d’apparaître. Henri m’a dit que vous appeliez ce phénomène « catastrophe ». Si j’ai bien compris, c’est un mot composé de deux idées : « Cata » veut dire le grand bouleversement, la fin de ce qui était, « Strophe » veut dire un nouvel ordre, une nouvelle page à écrire.
Informé par Henri de mes émotions matinales, Emmanuel m’a envoyée une histoire vraie qui explique que souvent, on est tellement impressionné par le drame de la « Cata » qu’on ne sait pas voir ce qui viendra à sa suite, la « Strophe ». Alors c’est l’histoire de ce marin, participant à une course autour du monde au sujet de laquelle je vous avais écrite une lettre pour célébrer ensemble l’esprit d’aventure :
Ce marin, proche de la ligne d’arrivée, a compris qu’il n’allait pas gagner la course, et s’est accordé quelques instants de sommeil pour se reposer tant il était fatigué par ces mois de combats de tous les instants. Et, durant son sommeil, un bateau l’a percuté, au point qu’il a failli tout perdre.
Ouille ouille ouille, que cet événement a dû être dure à vivre. Emmanuel m’a dit que ce marin a réussi a rallier la ligne d’arrivée. Comme je n’étais pas très tranquille, Henri m’a expliqué que dans ces courses incroyables, l’art de se reposer est un élément essentiel pour espérer gagner, et qu’il ne fallait pas m’en faire.
Henri et Emmanuel m’ont dit que, par chez-vous, il y a plein d’histoires de bateaux qui ont coulé en raison de collisions soit avec des cailloux, soit avec d’autres bateaux. J’ai cru comprendre que ces disparitions catastrophiques étaient telles, que, tout comme pour les humains disparus non loin de chez vous lors d’une guerre atroce… :
… Vous aviez aussi créé un lieu de mémoire pour se souvenir de tous les marins disparus en mer.
Pauvres humains, je vois que souvent vous êtes victimes de collisions contre votre volonté. Henri et Emmanuel m’ont expliqué que j’avais raison, et que pour faire face à ce péril permanent, les humains se sont organisés et des personnes très courageuses interviennent pour sauver les marins en perdition.
Mais est-ce que la catastrophe n’arrive qu’aux humains ?
Emmanuel me dit que nous les autres, les animaux, pouvons aussi être victimes de ces accidents brutaux, et que, du coup, beaucoup de personnes se mobilisent pour essayer de nous aider :
Henri et Emmanuel m’ont aussi expliqué que certains animaux avaient dans leur vie des moments réguliers où ils percutent ce qui ne leur convient pas :
Quel choc ! Ces bisons sont fous, ils vont se tuer à rentrer dedans comme ça. Henri m’a expliqué que ces bestioles ne sont pas folles, bien au contraire. Elles font cela pour marquer leur territoire.
Ah ?
Oui maintenant, je comprends, je vous en avais parlé dans une lettre ; faire respecter son territoire est très important pour les animaux. Mais bon, de là à se taper dessus, moi l’éléphante je ne suis pas d’accord. Je vous en avais fait part ; il y a toujours des solutions pacifiques plutôt que de se battre :
Emmanuel me dit que l’on ne peut éviter les collisions, c’est un phénomène naturel au point que vous autres, les humains, avaient essayé d’établir leur principe physique.
Mes chers enfants, moi l’éléphante philosophe, comprends que si ces chocs font partie de la nature, l’important est de réfléchir pour les limiter. Je vous envoie pour y penser ensemble cette belle image, peinte par Mister Turner lors d’une tempête non loin de vos côtes, en plein Hiver. On y voit le déluge, mais aussi les éclairs de lumière :
Je vous embrasse très fort,
A demain,
Shila